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19 août 2005

Un périple à la mer

periple___la_mer

Elle nage. Elle a froid. Ses membres lui tirent. Ses jambes sont lourdes. Ses bras sont engourdis. Ses larmes, gouttes salées se mêlent aux flots.

L’océan est calme. Tout à l’heure, elle a franchi le pas. Celui dont elle a si souvent rêvé. Larguer les amarres. Déposer les bagages. Et partir. Nager jusqu’au bout de l’horizon, jusqu’au bout de ses rêves, jusqu’au bout de sa nuit, jusqu’au bout de sa vie.

L’après-midi, elle était là, allongée sur le sable, les yeux noyés sur la ligne d’horizon. La plage est grande, elle n’était pas attentive aux bruits des enfants tout proches, aux cris des parisiens dans la froideur de l’eau.

Elle regardait les vagues, impassibles rouleaux recommençant sans cesse leur tonitruant va et vient. Simulacre déhanchement de l’amour de l’océan et de la plage. Et puis la mer au loin. L’horizon brumeux où nos rêves s’égarent, à la recherche de l’autre, requête impossible.

Le soir est tombé doucement. L’océan s’est assagi. La plage s’est désertifié. Seules quelques mouettes criardes strient le ciel de leurs espoirs de pêche.

Elle s’est levée. A déposé en évidence les papiers et les clés de sa voiture, son portable, sa montre. Témoins de sa vie passée. Elle a quitté son maillot et doucement elle est rentrée dans l’eau. Sa peau a frissonné. Elle est encore chaude du soleil de la fin d’été, des rêves érotiques de l’après-midi. Bravement, comme un défi, elle a avancé dans les vagues : à nous deux la mer, à nous deux la vie !

Elle nage.. enfin fait du sur place. Petit à petit, les forces la quittent. Déjà le gros bouillon avalé au franchissement des vagues l’avait laissé pantelante. Elle n’a rien d’un poisson cette petite terrestre qui rêve de mer !

Un changement se produit… d’un côté elle coule… de l’autre côté elle vole, enfin elle nage comme si elle volait. Fluide, rapide ondine. Libre. Elle danse sur la mer. Il lui faut choisir l’un ou l’autre corps. Adieu corps et vie terrestre. Elle  renait tout de suite, laissant la valise de sa vie au fond de l’eau.

Tout de suite elle apprécie sa nouvelle condition. Elle ne s’attarde pas à son corps transformé, à la perte de ses jambes (de toute façon… j’aimais pas courir)… elle joue quelques instants à ces sublimes naïades qui dansent sur l’eau, filent vers le fond et rejaillissent dans un faisceau d’écumes.

Une horde de crevettes viennent tournoyer autour d’elle. On dirait des grenouilles de bénitier tellement elles cancanent fort.

-         Va-t’en, affreuse humaine !! vocifèrent-elles.

-         Bonjour l’accueil !! se dit-elle

D’un coup de queue (eh oui !) elle se projette vers la ligne d’horizon. C’est magique. Ce simple petit mouvement dont elle n’a pas mesuré l’amplitude la fait aller à des lieux de là.

Elle reconnaît la Pointe du Raz. Un nouveau coup de queue… et la voilà en haut de la Manche. Elle jubile. Elle s’amuse à faire des sauts à l’horizon pour égayer les vacanciers allongés mollement dans leur transats. Mais, elle a beau faire des sauts de carpes, des sauts de dauphins et des sauts de baleine… ceux-ci restent le nez dans leur journal, dans leur livre. Les enfants construisent d’éternels châteaux de sable, et les romantiques amoureux mettent les traces de leurs pieds les uns dans les autres.

Alors, triste, d’un coup de queue rageur, elle tourne le dos aux côtes françaises. Elle s’en va. Elle essaie de parler aux dauphins. Ils la narguent de leurs rires moqueurs. Elle tente un dialogue avec les poissons volants. Ils la dédaignent d’un bout d’aile.

Elle croise de beaux paquebots au loin, des croisières dont elle entend nostalgique les flon flons au loin.

Elle croise des voiliers, oiseaux des mers silencieux si élancés qu’un rien pourrait les briser.

Elle croise de noirs tankers, pollueurs des mers, images de mort et de désuet progrès humain.

Elle préfère rester loin des côtes, oublier la terre, ses tourments, ses déceptions, ses échecs.

Et un jour, après bien des errances, une île apparaît. Petit point noyé dans le Pacifique. La plage qui l’accueille a la forme d’un sourire qu’elle reconnaît.

Elle se laisse déposer par les vagues. Au plein soleil.

Elle est au bout de tout voyage. Elle ferme les yeux. Coulent les larmes d’eau douce.

Son portable sonne :

- Maman ??? pourquoi tu ne réonds plus ?? Où es tu ?

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Commentaires
I
Merci de ta visite. Je me suis un peu attardée et j'ai même fait connaissance avec ton ami le chat roux à qui je fais une caresse !<br /> <br /> J'ai un chat aussi.. mais en co-propriété ! Il s'est choisi aussi une autre demeure et viens chez moi.. quand ca lui chante !! <br /> <br /> C'est comme ca les matous !!!<br /> <br /> Amicalement Iles Cook
L
Eh eh je suis content de t'avoir retrouvé. Je connaissais déjà ton site mais je n'avais pas fait le rapprochement... Bonne soirée. :-)
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