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19 octobre 2005

Talons aiguilles

Consignes :

Ecrire un texte en prose à la troisième personne du singulier, féminin ('elle') mettant en scène un homme qui marche dans la rue, dans une main une paire d'escarpins noirs, dans l'autre un sachet de boulanger. (le 'je' sera banni du texte) .

Talons aiguilles

Un homme marche dans la rue, dans une main une paire d'escarpins noirs, dans l'autre un sachet de boulanger.

Elle marche derrière lui. A trois pas. Bien sûr, vous ne l’aurez pas remarquée, elle. Effacée, toute petite, un peu voutée, le sac bien serré contre elle, elle ressemble aux petites vieilles qui fréquentent l’église plusieurs fois par jour.

D’ailleurs, elle en sort de Sainte-Madeleine. Elle y va trois fois par jour, la messe le matin tôt, où elle prie pour le repos de l’âme de son Baptistin. Et puis le midi, en revenant de chercher son pain. Ca c’est son petit apéritif en quelque sorte, à l’ombre des grands piliers, elle observe ceux qui entrent, ceux qui sortent. Et puis les allers et venues… au confessionnal ! Un régal ! D’ailleurs c’est là, qu’elle allait comme tous les midis… quand surprise…

En rentrant dans la boulangerie « Au bon pain doré », elle a été proprement bousculée par cet énergumène sur le pas de la porte. Vous vous rendez compte… un sac récupéré ici à la boulangerie ( avec du pain à l’intérieur ??)… et dans l’autre main : des escarpins noirs, finements travaillés, avec un talon aiguille, si vous voyez… d’une hauteur !! A ne porter que par des dames de petites vertus… comme si ca allait la rehausser leur vertu !

Du coup, elle est ressortie de la boulangerie et a décidé de suivre cet escogriffe… qui ne s’est même pas excusé de son indélicatesse…

Elle observe le dos de cet homme, un peu voûté, la silhouette fondue dans un grand imperméable… Elle s’interroge si dans son souvenir elle ne l’aurait pas déjà vu cet homme… C’est que en ce moment à Mont de Marsan, il s’en passe des choses dans cette petite ville du sud-ouest ! Il y a des meurtres inexpliqués, toutes des femmes pas très jeunes, bonnes paroissiennes que l’on retrouve au petit matin, dans le petit jardin derrière Sainte Madeleine. La police est sur les dents bien sûr … mais avec les fêtes qui se sont déroulées il y a tout juste une semaine…

Une vraie beuverie ces fêtes, autour des corridas qui échauffent le sang. Les rues sont débaptisées, et fleurissent les rues des «bois-sans-soif», du «p’tit jaune»… et cette foule qui parcourt les rues suivant les bandas qui mettent l’ambiance, donnent chaud, donnent envie de boire… Les rues sont jonchées de gens saouls, de vomi, d’urine, d’odeur de frites, de churros… Les commerçants ceignent leurs vitrines de bois, palissades. Les arbres, les fontaines sont protégées de grillage.

Elle, elle ne sort pas durant cette semaine de fête. Juste pour la messe qui fête Madeleine, patronne de la ville. Entre les clairs voies de ses volets, elle observe cette turpitude, le nez dans un mouchoir aromatisé de lavande… parce que bonjour les odeurs qui montent…

N’est elle pas folle de suivre cet homme ?? Ne sait elle pas que ces assasins, ces violeurs ils sont capables de tout !

L’homme s’est arrêté… il vient de rentrer dans la boutique «Votre élégance». La boutique de son amie… mademoiselle Alice… bonne chrétienne comme elle !

Vite vite, elle court vers le commissariat. Elle va alerter ces maudits gendarmes qui ne sont jamais là quand il faut bien sûr… Elle raconte échevelée, avec un tel débit que le policier ne comprend pas son discours… mais la suit. La boutique est si proche.

Elle reste là, l’œil arrondi, la bouche ouverte. Dans la vitrine, l’homme est là. Il a sorti du grand sac à papier, les tissus soyeux, aux couleurs de l’automne. Et délicatement au milieu de cette féérie rousse, il a posé en «vedette» les escarpins noirs… évoquant les soirées d’automne, les bals, l’éternelle féminité..

Elle en a perdu la voix. Elle bredouille. Le policier rigole dans sa moustache… ah ces mémés ! Toujours à s’imaginer… Y ‘a pas de quoi fouetter un chat…

vitrine

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Commentaires
I
Pierre de lune<br /> Ecrire un roman ?? ou la la ... la barre est encore trop haute pour moi .. peut être que cela viendra !<br /> <br /> Mado<br /> <br /> merci de ton passage... C'est agréable quand les lecteurs aiment nos textes.. Mais où te lire ??
M
c'était super touchant j'ai adoré merci a tous bisous
P
... je le pensais c'est si bien écrit que la question vient d'elle-même "pourquoi ne pas écrire un "roman"...?<br /> Bisous, à tout bientôt, Pierre.
I
l'imaginaire... il ne faut pas grand chose pour le stimuler, un mot en entraine un autre.. on est parfois étonnée du résultat... au fir et à mesure de l'histoire, le personnage prend une dimension.. qui parfois échappe. Tout le monde le dit souvent. J'ai été étonnée de voir que c'était vrai !
U
J'aimes la créativité de tes textes. C'est peu commun à ma connaissance personnelle, et j'aimes beaucoups.
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